Chère lectrice (cher lecteur),
Ce petit billet, sans valeur faciale mais suffisamment affranchi, est écrit depuis le si précieux et si délicieux festival des « Estivales de l’illustration » à Sarrant, Pays des Portes de Gascogne, Gers. C’est ce projet fou, porté par une bande d’artistes et de bénévoles transcendés et magnifiques, qui inspire (illustre !) cette chronique. Ici on baigne dans le pur développement local, et pas que les soirs d’orages ! Ce festival est l’événement fort et phare d’un rêve d’émancipation locale et territoriale dont le socle et l’épicentre se situent à la librairie-tartinerie* implantée là depuis 18 ans. Un rêve devenu réalité à force de pugnacité, de convictions et de rencontres humaines. De l’improbable qui existe et qui perdure. Qui croît et qui embellit. Et qui explore et rend possible l’économie territoriale d’aujourd’hui et de demain.
Certes, me direz-vous avec pertinence, mais quel rapport avec l’Abécédaire ? Et bien, le suivant. En effet, de manière arbitraire, la lettre O est à l’honneur de cette chronique. Et ce sera O comme onirisme. Attention ! Certain lecteur solitaire pourrait, d’une lecture trop rapide, lire O comme onanisme. Que nenni ! Il s’agit bien d’évoquer l’art du rêve. Pourquoi ? Parce que ! Parce que vous porteur de projet, vous êtes d’abord porteur de rêves. Vous poétisez votre vie à venir. Vous l’inventez. Vous en êtes l’auteur. Cette vie plus dense en sens, vous la rendez possible parce que vous osez dire oui au changement. Chasser le phantasme, ce faux ami qui vous déroute, pour ne garder que le rêve, boussole fiable et moteur puissant de la mobilité. Gare aux donneurs de leçons, tristes liquidateurs de l’original et des jolis desseins. Fi des empêcheurs de rêver en rond (ron) ! Fi de ces pourfendeurs de rêveurs. Porteurs d’idées, rêvez ! Vous aurez tout le temps de vous frotter aux principes de réalité quand vous vous mettrez en route. Là il vous faudra raboter vos projets, les rapetisser, les réduire, les contraindre, les émincer. Alors partez avec le plus gros capital possible de manière à ne pas vous retrouver avec, au bout de la route, un projet chétif, certes sérieux mais tout gris.
Et puis ne rêvez pas seul ! À plusieurs les rêves sont peut-être plus complexes à produire mais ils sont plus solides et ils vont plus loin. Osez le collectif ! Tordez le cou au phantasme de la figure de l’entrepreneur, seul et chef. De plus en plus de projets incertains quand ils sont menés de manière individuels trouvent de la viabilité quand ils sont menés de manière coopérative et collective. Comme le dit le poète troubadour « je ne vis pas ma vie, je la rêve ». Une manière de résister à la rudesse du monde en somme. Vive les Estivales de l’illustration ! Vive la transition poétique des territoires !
O ? Il est déjà cette heure ? Désolé mais il est tard, Madame, il faut que je rentre chez moi.
À dans trois mois !
* Voir la chronique de la librairie dans chaque numéro de Village Magazine.
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